De toute évidence nous sommes des êtres compétents. Nous sommes capables de réussir une foule d'opérations dans le monde: marcher, construire, étudier, voter... Tout cela relève de techniques appropriées à des objectifs qui, en dernière analyse, servent nos pulsions et nos besoins. C'est de la technologie et toute technologie est à la portée d'une machine. Le propre de la machine est de n'avoir pas de conscience, de n'être pas là, de n'être pas tout simplement. A fortiori une machine ne se pense pas comme un Je, elle n'est pas un Je. Mais une machine peut très bien opérer une anticipation temporelle, organiser son environnement, accumuler des compétences, développer une stratégie et vérifier sa valeur à l'usage, etc.
Tout cela n'est pas le propre de l'homme, mais l'homme le fait aussi. Finissons-en au passage avec cette vieille formulation du "propre de...". Il est plus que probable que la vie se soit développée ailleurs dans le vaste univers, que d'autres pensées s'y soient déployées et que l'homme ne soit pas le seul être pensant, qu'il soit même "sous-pensant" comparé à d'autre êtres et que pour ces "êtres" il ne soit peut-être même pas question d'être, de pensée ou de Je... Alors, si nous voulons être des gentlemen, et j'espère que nous le voulons, il serait plus approprié de ne plus nous approprier la pensée comme étant notre propre. "Ca pense" disait mon homonyme L.
... digression inutile au propos: cut et nouvel article
Le langage, en tant que fonction de communication, est encore une compétence technologique. La possibilité du langage, élémentairement, est fondée sur la possibilité de re-connaître les objets du monde réel, c'est donc une fonction cognitive, un algorithme fonctionnel basé sur une définition descriptive: "ceci est une chaise" signifie "cette chose possède les caractéristiques reconnaissables de la chaise". "Je sais ce qu'est une chaise" signifie "je connais les caractéristiques de ce qu'on appelle une chaise et elles me permettent de la re-connaître". Encore une fois: une machine pourrait le faire et le fera dans un avenir proche. Mais une machine ne dira pas Je! Ou si elle le dit ce sera pour la forme, parce qu'elle nous le dit à nous. Je est une "chose", plutôt une instance, à jamais inconnaissable pour une machine! Une machine ne peut reconnaître un Je, etc.
... trop détourné, trop long: recentrer
Le langage s'est peut-être développé au cours de notre évolution parce qu'il dotait notre espèce d'un outil très performant pour survivre: parler permet en effet de s'organiser et de transmettre la connaissance de génération en générations, etc. Mais avec le langage vient la question. Avec le premier mot vient l'absence de tous les autres, et avec les mots du monde réel viennent ceux de l'au-delà.
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Cette dialectique n'est-elle pas le but premier de la pensée, et donc du langage: dire l'au-delà.
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Est-ce que dire l'au-delà ne vient à pas l'homme comme quand il dit "ne m'anéantis pas, je suis un homme". cf l'Etre et le Néant, Sartre
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Etre là, n'est-ce pas précisément ce qui effraye? Je suis là, cerné par l'au-delà, persécuté par le néant. cf Sein und Zeit, l'angoisse de l'effondrement de l'étant, Martin Heidegger.
... en cours